Veille documentaire et informations N°23 - décembre 2011

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1/ Discriminations :
1.1 Documentation générale:

Europe :

Selon la CEDH, le refus d’accorder à une ressortissante étrangère, légalement présente sur le territoire britannique, un accès prioritaire à un logement social  n’est pas discriminatoire
Le fils de la requérante n’avait obtenu un droit de séjour au Royaume-Uni qu’à la condition de ne solliciter aucune aide financière publique. Or, ce fils ayant vocation à être hébergé dans le logement de sa mère, celle-ci avait demandé à bénéficier d’un logement social.  Les autorités britanniques lui avaient refusé ce nouveau logement en estimant que cela reviendrait à violer la condition de séjour.
La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), dans un arrêt du 27/09/11, a estimé que ce refus ne constitue pas une discrimination dans la jouissance du droit au respect de la vie privée et familiale. En effet, si la CEDH rappelle que lorsqu’un État décide d’accorder des prestations sociales, il doit le faire de manière non discriminatoire, elle estime qu’en l’espèce la différence de traitement n’était pas fondée sur la nationalité du fils de la requérante mais sur son statut migratoire qui «n’est pas une caractéristique inhérente à la personne ou immuable telle que le sexe ou la race, mais comporte une part de choix». 
Dès lors, «alors que la différence de traitement fondée sur un tel [statut migratoire] doit toujours être objectivement et raisonnablement justifiable, cette justification exigée n’a pas à être aussi forte que dans les cas où la distinction est fondée, par exemple, sur la nationalité».
D’autre part, l’octroi d’un logement est un sujet d’«une nature essentiellement économique et sociale» devant laisser une plus grande marge d’appréciation au profit des autorités internes. Pour la Cour, il est également «légitime de mettre en place des critères fixant les conditions dans lesquelles peuvent être allouées des prestations, telles qu’un logement social, lorsque l’offre disponible n’est pas suffisante pour satisfaire la demande, tant que de tels critères ne sont pas arbitraires ou discriminatoires».
LaCEDH considère donc que la catégorisation opérée par la législation britannique en ce qui concerne l’ordre de priorité dans l’accès à un logement social n’est ni arbitraire, ni discriminatoire car la législation litigieuse «poursuivait un but légitime, à savoir allouer de façon équitable des ressources limitées [ici «le faible nombre de logements sociaux disponibles au Royaume-Uni»] entre les différentes catégories». 
La Cour prend néanmoins le soin de conclure en soulignant que la requérante «ne s’est jamais vraiment retrouvée sans domicile» et que la législation britannique exigeait des autorités locales qu’elles apportent leur aide afin d’éviter la perte du logement » (CEDH, 4e Sect. 27 septembre 2011,Bah c. Royaume-Uni ; Source : N. Hervieu in Combats pour les Droits de l’Homme).  

Villes de demain - 10 études de cas de "bonnes politiques et pratiques de villes relevant les défis urbains" 
Ces études de cas ont été réalisées dans le cadre d'un processus de réflexion sur les « Villes de demain », organisé par la Commission européenne. Le but est de souligner les principaux défis à relever par les villes au cours de la prochaine décennie ainsi qu’à identifier les principaux objectifs, les instruments et les méthodes qu’elles peuvent mettre en place pour les résoudre. Dans ce cadre, 10 études de cas ont été réalisées. Elles présentent les bonnes pratiques de gouvernance des villes pour répondre aux défis urbains. 
A noter, l’étude sur la ville d’Amsterdam : cette dernière cherche à repenser sa politique de diversité afin de renforcer la cohésion sociale et de s'attaquer aux risques de ségrégation.Contrairement à d’autres villes qui considèrent l'intégration des migrants comme un problème, conformément aux politiques néerlandaises, Amsterdam a une approche plus ouverte en tentant de gérer de la même manière tous les types de minorités (étrangers, femmes, homosexuels, handicapés, etc.). Son objectif est de promouvoir la coopération et la participation de tous les habitants, ainsi que de lancer des actions susceptibles de délégitimer et de lutter contre le racisme et la discrimination (Villes de demain - 10 études de cas de "bonnes politiques et pratiques de villes relevant les défis urbains", résumé (en français).

France :

Evacuation « prioritaire » des campements illicites de « Roms » d’origine roumaine et bulgare au cours de l’été 2010 : le Comité Européen des Droits Sociaux conclue « à une violation aggravée des droits de l’homme » par la France au vu de son engagement à assurer l'exercice effectif du droit au logement 
Dans une décision  adoptée le 28/06/11 mais rendue publique le 10/11/11, le Comité Européen des Droits Sociaux (CEDS) constate que la France viole trois droits fondamentaux, le droit au logement, le droit des migrants et celui concernant les discriminations, dans le cadre d’une procédure engagée après les expulsions de « Roms » à l’été 2010. 
Suite à la volonté de supprimer les campements illégaux annoncée par N. Sarkozy  à la fin de juillet 2010, une circulaire était parue,  le 05/08/10 qui ciblait en priorité les camps « Roms » et dont l’application avait suscité de vives réactions (Cette circulaire a par la suite été annulée par le Conseil d’État)cf Veille doc&infos LCD et Logement n°21.  Une réclamation collective contre la France avait été déposée le 15/11/10 auprès du CEDS, par le Centre sur les droits au logement et les expulsions (COHRE), une ONG basée à Genève (Réclamation n° 63/2010, Centre on Housing Rights and Evictions c. France). Cette réclamation avait été jugée recevable le 25/01/11 cf Veille doc&infos LCD et Logement n°20 et, au vu de la gravité des allégations formulées par le COHRE, il avait été décidé de traiter cette réclamation de manière  prioritaire. 
Dans sa décision, le Comité considère que « le Gouvernement n’a pas démontré que les évacuations forcées dont ont fait l’objet les Roms d’origine roumaine et bulgare pendant l’été 2010 aient été opérées dans des conditions respectueuses de leur dignité et que des solutions de relogement leur aient été proposées. Bien au contraire, ces évacuations se sont produites dans un climat de discrimination ethnique (stigmatisation des Roms) et de contrainte (menace immédiate d’expulsion du territoire national) », engendrée par la circulaire du 05/08/10. En effet, pour le Comité «il résulte de ses termes mêmes que la circulaire du 5 août 2010 vise, par des dispositions impératives à caractère général, à faire évacuer de manière prioritaire les campements illicites de Roms (…), en méconnaissance du principe d’égalité devant la loi » et en «désignant spécialement certains de leurs occupants en raison de leur origine ethnique ».Dès lors, pour le Comité « l’application de la circulaire du 5 août 2010 a donné lieu à un traitement clairement et directement discriminatoire, en raison de leur origine ethnique, des personnes qu’elle concernait. »
Dans ces conditions, « du fait de la prise de mesures contraires à la dignité humaine visant et touchant expressément des groupes vulnérables, ainsi que du rôle actif des autorités publiques dans le lancement et la mise en œuvre de cette démarche sécuritaire discriminatoire », le Comité conclue « à une violation aggravée des droits de l’homme » au vu de l’engagement des Etats signataires à assurer l'exercice effectif du droit au logement et « à prévenir et à réduire l'état de sans-abri en vue de son élimination progressive »( article 31§2 de la Charte révisée). D’autant que le Comité avait déjà constaté de telles violations dans une  décision en 2009 cf Veille doc&infos LCD et Logement n°18
Par ailleurs, « les mesures en cause révèlent un non-respect des valeurs essentielles inscrites dans la Charte sociale européenne notamment, la dignité humaine, dont la nature et l’ampleur vont au-delà des violations ordinaires de la Charte (…). Elles mettent en cause l’intérêt de la collectivité toute entière et les normes fondamentales communes des Etats membres du Conseil de l’Europe que sont les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit». Pour le Comité, la situation exige donc une attention urgente de la part de tous les Etats membres du Conseil de l’Europe et les invite à rendre publique sa décision sur le bien-fondé dès sa notification aux parties et au Comité des Ministres. 
En ce qui concerne plus particulièrement le Gouvernement français, le constat de violations aggravées implique non seulement l’adoption de mesures de réparation adéquates mais également l’obligation d’offrir des assurances appropriées et des garanties de non répétition et de s’assurer que de telles violations cessent et ne se reproduisent plus. 
Prenant acte de ces éléments, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, chargé de la mise en œuvre des conclusions de ce rapport, a donc publié une résolution invitant "la France à faire état, lors d'une prochaine réunion, des mesures prises ou envisagées afin de répondre à la situation décrite dans la réclamationet à faire état de la coopération avec d'autres pays concernés" (Résolution CM/ResChS(2011) du Comité des ministres du Conseil de l'Europe, sur la réclamation collective n° 63/2010 du Centre sur les droits au logement et les expulsions (COHRE) contre la France, et rapport du CEDS au Comité des ministres sur cette même réclamation).

Refus de louer des appartements à des personnes bénéficiaire de l’Allocation adulte handicapé (AAH) : le Défenseur des droits condamne la pratique discriminatoire du groupe immobilier Foncia 
La Haute autorité de lutte contre les discriminations (Halde) avait été saisie entre 2008 et 2010 de 3 réclamations de particuliers bénéficiaires de l'Allocation adultes handicapés ou d'une pension d'invalidité. Ils s'étaient vu refuser par des agences immobilières Foncia de louer des appartements au motif que leurs revenus n'étaient pas saisissables (pour l'AAH) ou ne constituaient pas un revenu d'activité (pour la pension d'invalidité). La Halde avait alors réalisé des tests téléphoniques auprès des agences concernées et questionné par courrier le directeur juridique et le président du groupe, qui ont confirmé les faits. Dans un courrier, le président du groupe soulignait que "cette nécessaire sélection du preneur, en fonction des revenus et de leur caractère saisissable ou insaisissable" était "la seule méthode permettant de garantir au propriétaire le recouvrement effectif des loyers".
Dans une recommandation récemment rendue, non publiée à ce jour, le Défenseur des droits estime que "la politique adoptée par le groupe Foncia, consistant à écarter les personnes vivant de l'AAH, voire celles percevant une pension d'invalidité, était de nature à caractériser l'existence d'une discrimination indirecte fondée sur le handicap" car "si l'objectif poursuivi est légitime dans son principe, les moyens employés sont manifestement disproportionnées et injustifiés, les personnes concernées étant a priori solvables"
Il demande donc au groupe immobilier Foncia de "réformer ses pratiques" dans un délai de quatre mois. Dans un communiqué, le groupe Foncia a annoncé avoir "décidé d’appliquer sans délais cette recommandation du Défenseur des Droits et de modifier ses procédures de calcul des revenus pour l’octroi des logements" (Source : AFP, 13/12/11).

Rapport annuel de l’ONZUS : un sentiment de rejet des personnes vivant en ZUS fortement corrélé au sentiment de discrimination  
Selon le rapport 2011 de l’Observatoire National des Zones Urbaines Sensibles, il y a eu une diminution du nombre d'habitants dans ces quartiers puisque, en 2006, 4,4 millions de personnes vivaient en ZUS, soit 7 % de la  population, soit une baisse de 2,3 % depuis 1999, à l'exception néanmoins de plusieurs régions qui ont enregistré l'effet inverse (Ile-de-France, Languedoc-Roussillon, Aquitaine,  Provence-Alpes-Côte-D’azur et Corse). 
Les caractéristiques de ces habitants ont en revanche peu changé, cette population étant à la fois"plus jeune, moins diplômée, moins active" que dans les villes voisines, résume l'ONZUS. Cependant l’observation des revenus, montre la diversité des situations des ZUS qui s’inscrivent dans des contextes régionaux particuliers : les écarts entre ZUS sont parfois plus marqués que ceux enregistrés avec les autres quar­tiers des mêmes agglomérations. 
L’article «Situation socio-économique des immigrés, intégration et discriminations»du rap­port 2011 propose une exploitation de l’enquête Trajectoire et Origines, mise en œuvre par l’Ined et l’Insee en 2008 et 2009.  Immigrés et descendants d'immigrés représentent ainsi plus de la moitié des personnes âgées de 18 à 50 ans vivant en ZUS, ce taux allant jusqu'à 64 % dans les quartiers de la région parisienne. Les descendants d’immigrés vivent donc en ZUS deux fois plus souvent que l’en­semble de la population, et les immigrés près de trois fois plus souvent. Leur taux de chômage est globalement plus élevé que dans le reste de la population et, lorsqu'ils ont un emploi il est moins qualifié et le salaire moins élevé.
Plus de 97 % des descendants d’immigrés ont la nationalité française, que ce soit en ZUS ou hors ZUS. Près d’un immigré sur quatre a acquis la nationalité française. Ce taux dépasse 80 % pour les immigrés originaires du Vietnam, du Laos et du Cambodge.
Seulement 3 % des personnes vivant en ZUS pensent avoir été discriminées en raison de l’endroit où elles vivent. Cette proportion est cependant trois fois plus importante que pour les personnes vivant en dehors des ZUS. Il apparaît que le ressenti de discriminations en raison du quartier où l’on vit va souvent de pair avec celui de discriminations en raison de l’origine ou de la couleur de peau : ainsi, les personnes estimant avoir été victimes de discriminations raciales pensent 17 fois plus souvent que les autres avoir également été victimes de discriminations territoriales.
Alors que, en ZUS comme hors ZUS, près de neuf des­cendants d’immigrés sur dix se déclarent d’accord avec la proposition « je me sens Français », seulement 57 % d’entre eux en ZUS et 79 % hors ZUS se déclarent d’accord avec la proposition « on me voit comme un Français ». Ce sentiment de rejet est fortement corrélé au sentiment de discrimination.
Enfin, toutes origines confondues, les ménages sont majoritairement locataires (60 % contre 21 % dans leur agglomération) dans ces quartiers où, paradoxalement, "les grands logements sont plus rares qu'ailleurs, alors que les familles nombreuses y sont plus nombreuses"
Néanmoins les rédacteurs rappellent que « les quartiers sensibles connaissent une mobilité rési­dentielle importante et que, d’une année sur l’autre, on ne parle pas de la même population : plus d’un ménage sur trois habitant en ZUS ne résidait pas dans le même logement cinq ans auparavant » (Observatoire Nationale des Zones Urbaines Sensibles, Rapport 2011 et synthèse).

Banlieue de la République 
L’Institut Montaigne a mené une enquête intitulée «Banlieue de la République » sur le territoire où ont éclaté les émeutes de 2005 : la communauté d’agglomération de Clichy-sous-Bois/Montfermeil (93). Ces deux villes bénéficient aujourd’hui du plus important plan de rénovation urbaine de France, mais doivent faire face à un fort taux de chômage. 
Adoptant une démarche transversale, cette enquête s’intéresse à l’ensemble des dimensions qui permettent de « faire société » : le logement et la rénovation urbainel’éducation,l’emploi et la sécurité. Elle se termine en se demandant à quel point ces dimensions influencent le rapport des personnes interrogées au fait politique et aux questions religieuses. 
Comme le rappelle Gilles Kepel dans l’introduction, cette étude « ne porte pas sur l’émergence de l’islam comme tel – dont chacun sait aujourd’hui qu’il constitue une composante de notre nation. Elle s’interroge sur une agglomération, à tous les sens du terme, où l’islam joue un rôle important, intriqué avec d’autres enjeux – la Ville, l’éducation, l’emploi, la sécurité, la politique, la religion – pour former la notion même de « banlieue » dans l’usage courant du français contemporain. De ce point de vue, nous posons en postulat de départ que Clichy-Montfermeil, c’est la France même. La banlieue n’est pas à la marge, mais au centre : c’est au prix de ce renversement de perspective que se lit notre avenir commun» (« Banlieue de la république », G. Kepel, Institut Montaigne, oct. 2011).

Droit au logement versus mixité ?
La Revue Urbanisme a consacré un dossier à la politique de la ville : restitution d’une table ronde, chronologie et contributions de différents acteurs et chercheurs. 
A noter, la contribution de N. Houard, docteure en sciences politiques (IEP Paris) sur « Droit au logement versus mixité ? » où  elle rappelle que la paupérisation progressive de la population des grands ensembles d’HLM est un élément clé de la compréhension des processus à l’œuvre dans les quartiers populaires. 
Dans une 1ère partie elle décrit l’esprit des lois tournées vers le droit au logement et la mixité. Dans une 2nde partie, elle analyse les processus d’attribution des logements sociaux dans les Hauts-de-Seine et la Seine-Saint-Denis. En conclusion, elle relève « les tensions observées entre le droit au logement et la mixité, au niveau national et au niveau local, et le décalage entre le modèle républicain « color blind »– traduit dans la politique nationale – et les “politiques de peuplement” menées localement au nom de la mixité sociale. De fait, à l’échelle des quartiers prioritaires de la politique de la Ville, les gestionnaires locaux prennent vraisemblablement en compte des critères particularistes, voire ethniques, dans la mise en œuvre des politiques publiques, les acteurs centraux de l’attribution – notamment les notables locaux et les grands bailleurs sociaux – détenant un certain nombre de ressources pour résister à l’accueil de ménages qu’ils jugent indésirables. Les obstacles qui se dressent lors de la mise en œuvre du DALO et les représentations véhiculées par les acteurs de la rénovation urbaine sont particulièrement emblématiques de la résistance du système d’acteurs à la concentration de ménages précarisés, immigrés, ou descendants d’immigrés Droit au logement versus mixité ?», N. Houard, Revue Urbanisme sept-oct 2011, n°33 pp57-59) 

Pourquoi la France résiste à l’empowerment
Dans la même revue, le sociologue T. Kirszbaum estime qu’en s’institutionnalisant, la politique française de la Ville a contribué à la mise en place d’un véritable agenda anti empowerment et pointe le passage de la reconnaissance à la connaissance des quartiers sensibles. Pour lui, cette évolution n’a pas abouti à une allocation plus équitable des ressources publiques, tout en inhibant l’émergence d’une capacité d’action des habitants. Il propose d’enrichir la politique de la ville « d’un acteur collectif – le quartier –qui fait aujourd’hui défaut dans les schémas décisionnels et les dynamiques d’interpellation susceptibles d’apporter du changement (…) Encore faut-il les reconnaître comme des sujets collectifs de l’action et pas uniquement comme les objets individuels d’une sollicitude ambiguë » (« Pourquoi la France résiste à l’empowerment», T. Kirszbaum, Revue Urbanisme sept-oct 2011, n°33,  pp 74-76)

Mixité sociale, travaux de recherche du PUCA 2000-2010 
Après une introduction commentant l’utilisation de la notion de mixité dans les textes législatifs français (notamment la loi SRU), mais aussi les approches suivies par les chercheurs pour aborder cette question, ce document propose des résumés des ouvrages publiés par divers éditeurs ainsi que des présentations résumées ou parfois plus développées de rapports de recherches menées à l’initiative du PUCA (Plan Urbanisme Construction Architecture) sur les questions de mixité sociale. Sont également proposés les résumés des articles d’un numéro des Annales de la recherche urbaine. Toutes ces études qui abordent la mixité sous divers angles (marché du logement, classes sociales, quartiers d’habitat social, scolarisation, mobilité résidentielle, etc.) portent sur diverses tailles d’agglomérations, en France et dans d’autres pays européens, proposent parfois des approches comparatives (« Mixité sociale, Travaux de recherche du PUCA 2000-2010 », juin 2011).

1.2 Logement : documentation et informations générales

Europe :

Le Comité économique et social européen réclame une stratégie ambitieuse de lutte contre le sans-abrisme
Face aux mauvaises conditions de logement qui touchaient 30 millions de citoyens européens en 2009, le Comité économique et social européen (CESE), dans un avis adopté le 27/10/11, invite la Commission européenne à élaborer une stratégie ambitieuse de lutte contre le phénomène du « sans-abrisme » et à créer une agence européenne à cet effet.
Le CESE recommande en outre à l’Union européenne de consacrer beaucoup plus de moyens issus des fonds structurels (notamment le Fonds social européen et le Fonds européen de développement régional) à la recherche de solutions, et plus particulièrement en ce qui concerne la construction de logements permanents. Enfin, le comité préconise l’élaboration de politiques européennes visant à limiter toute tendance spéculative sur le marché immobilier (Avis du Comité économique et social européen  sur le "Problème des sans-abri", 27/10/11).

France :

Le défenseur des droits recommande la mise en place immédiate d’un dispositif de trêve hivernale des coupures d'eau et d'électricité en faveur de personnes vivant en caravane sur un terrain dont elles sont propriétaires 
Le défenseur des droits, D. Baudis, a envoyé une recommandation, non publiée à ce jour,  "à l'attention des maires des communes de France", pour qu'un dispositif de trêve hivernale des coupures d'eau et d'électricité "soit dès à présent mis en œuvre en faveur de personnes vivant en caravane sur un terrain dont elles sont propriétaires". "S'il n'est pas possible de procéder au raccordement à l'eau et à l'électricité de manière définitive d'un terrain classé comme inconstructible", souligne en effet le défenseur des droits, "en revanche les maires ne peuvent pas s'opposer à un tel raccordement dès lors que celui-ci a un caractère provisoire et que le demandeur fait réaliser les travaux à ses frais".
Il rappelle que  le législateur  "a fait le choix deprotéger les familles sédentaires faisant face à un risque d'expulsion ou de coupure totale d'électricité durant la période hivernale ", alors que "des personnes qui vivent en caravane, sur un terrain leur appartenant, et qui n'ont pas d'impayés, ne bénéficient à l'inverse d'aucune protection".
Une différence de traitement d'autant plus paradoxale, de son point de vue, que "l'habitat non sédentaire, qu'il soit choisi ou subi, implique obligatoirement des conditions de vie plus précaires, qui s'amplifient à l'arrivée de l'hiver". Par ailleurs, il rappelle que "L'absence d'eau et d'électricité est particulièrement dramatique pour les enfants, dont l'intérêt supérieur n'est pas compatible avec le risque de se voir couper brutalement l'accès à l'eau et à l'électricité(Source : ASH, 19/12/11).

Le comité de suivi de la mise en œuvre de la loi DALO en appelle au chef de l'Etat 
Le Comité de suivi de la mise en œuvre du Dalo a rendu public son 5e rapport annuel.
Si "la loi est globalement respectée sur la plus grande partie du territoiredonnant lieu à de bonnes pratiques et à un engagement réel des acteurs du logement et de l'insertion", constate son rapporteur, B. Lacharme, dans un communiqué, "elle ne l'est pas en Ile-de-France ou dans des départements tels que les Bouches-du-Rhône, le Var, les Alpes-Maritimes ou la Guyane"
"Le non-respect de la loi atteint au plus choquant quand des préfets, chargés par la commission de médiation de reloger un ménage menacé d'expulsion, ne le relogent pas et font appliquer le jugement d'expulsion par la police", déplore aussi le Comité.
La loi DALO n'est pas appliquée non plus, en matière d'hébergement, "dans des départements qui, pourtant, ne connaissent pas de tension particulière dans l'offre de logement"souligne le Comité de suivi. Les recours "se sont multipliés en raison des difficultés à obtenir une place dans un contexte de crise humanitaire", avance ce rapport, qui indique que "sur 64 départements ayant enregistré des recours hébergement, 38 ont un retard significatif".
Pour le Comité de suivi,une telle situation n'a rien d'inéluctable, à condition de prendre, enfin, en considération les recommandations qu’il a émises depuis son tout premier rapport, remis en octobre 2007. Or sur les suites données à chacune de ces 164 propositions, le bilan est maigre et « les propositions les plus stratégiques, celles qui conditionnent le respect du droit, n'ont pas été entendues".
Pourtant,  "2012 va être marquée, au 1er janvier, par l'ouverture de la dernière étape du calendrier de la loi DALO: le recours contentieux contre l'Etat en cas d'absence d'offre de logement, qui était ouvert aux personnes non logées ou mal logées depuis décembre 2008, le sera également aux personnes désignées prioritaires parce que leur demande de logement social a dépassé un délai considéré comme anormal".
Sans oublier que l'année comprend aussi "une échéance politique majeure", qui amène le Comité de suivi à formuler le vœu que ses constats sur la mise en œuvre du DALO "soient pris en compte dans le débat politique et servent à éclairer les décisions indispensables" qui doivent "intégrer quatre exigences" : offrir au moins un hébergement à toute personne en détresse ; mettre en œuvre un plan d'urgence pour reloger les ménages prioritaires dans les zones tendues ; organiser la gouvernance du logement ; réorienter les moyens de la solidarité nationale vers le logement des personnes de revenu modeste.
Le Comité de suivi propose également un système de "bonus-malus" des loyers pour rendre le logement privé à nouveau abordable. Il s'agirait d'instaurer une taxe progressive applicable au-dessus d'un certain prix au mètre carré, et dont le produit serait reversé à l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) pour subventionner les propriétaires privés acceptant de louer leur bien aux conditions du logement social. 
La solution aux problèmes de logement passe aussi, notamment, par la mobilisation des locaux vacantsviaune meilleure information des propriétaires assujettis à la taxe sur les logements vacants pour leur permettre d'en sortir, le développement du bail à réhabilitation ou encore la mise en œuvre d'un programme annuel d'acquisition par l'Etat de 3 000 logements vacants, destinés au relogement de ménages prioritaires ("Monsieur le président de la République, faisons enfin appliquer la loi DALO !"5e rapport annuel du Comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable, nov. 2011).

Hébergement : un rapport de la Cour des Comptes pointe les lacunes de la politique d’hébergement… 
Le nombre de personnes sans domicile, estimé à environ 150 000 personnes, a progressé de plus de 50 % ces dix dernières annéesa indiqué D. Migaud, 1er président de la Cour des comptes, le 15/12/11 devant le Comité d'Evaluation et de Contrôle des politiques publiques, à l'occasion de la présentation du rapport de la Haute Juridiction sur la politique d'hébergement des personnes sans domicile, non publiée à ce jour. 
Selon la Cour,  la politique de refondation de l'hébergement a été élaborée sans que l'Etat se soit donné les moyens d'une meilleure connaissance de la population concernée, qu'il s'agisse des personnes entrant dans le dispositif d'hébergement ou de celles qui, à sa sortie, sont en capacité d'accéder à un logement.
De plus,  l'accueil des personnes sans domicile souffre d'une organisation et d'une coordination insuffisantes et laDélégation interministérielle pour l'hébergement et l'accès au logement des personnes sans-abri ou mal logées (DIHAL), qui actuellement  n’a pas de moyens administratifs et financiers à sa disposition, devrait se voir doter de véritables pouvoirs.
La Cour des comptes a par ailleurs renouvelé le constat d'une offre d'hébergement insuffisante, en particulier dans les zones où les besoins sont les plus massifs. Et cela, en dépit de la progression du nombre de places d'hébergement et de structures tournées vers la réinsertion. L'institution estime donc nécessaire de créer des places supplémentaires dans les zones tendues, "en accélérant le redéploiement des crédits entre les directions régionales".
Les sorties vers le logement se heurtent pour leur part à de nombreux obstacles : toutes les personnes accueillies en hébergement d'urgence ne sont pas forcément éligibles au "logement d'abord" et le nombre de logements accessibles dans ce cadre est encore trop faible.
Pour améliorer l'efficacité de cette politique, il faut notamment "accélérer la reconquête des contingents préfectoraux dans le parc social mais aussi développer les formules innovantes d'accès au logement (intermédiation locative, maisons-relais…).
Autre constat : la prévention n'est pas assez développée. Or "de nombreuses mises à la rue pourraient être évitées par la mise en œuvre d'une politique de prévention plus efficace", notamment grâce à une meilleure connaissance des impayés de loyers, "signes annonciateurs" de possibles expulsions.
Par ailleurs,
 alors que la politique d'hébergement repose très largement sur les opérateurs associatifs, les relations de ces derniers avec l'Etat "se sont progressivement crispées jusqu'aux tensions de l'année 2011".
Dernière lacune relevée par la Cour des comptes : 
estimé à environ 1,5 milliard d'euros,le coût total exact de ce budget reste inconnu, faute notamment de données sur les dépenses des collectivités territoriales en la matière. La Juridiction attend donc de l'administration qu'elle évalue ce coût en distinguant les dépenses de fonctionnement des frais d'investissement, ainsi que les différentes sources de co-financement (associations, collectivités territoriales, usagers).
La Cour des comptes préconise enfin que la parole des personnes hébergées soit mieux entendue et leur participation mieux assurée afin de mieux prendre en compte leurs besoins.

… et le 1er rapport annuel de l'Observatoire national du 115 souligne le besoin d'hébergements 
La sollicitation des services d'urgence sociale n'a jamais été aussi élevée, indique le premier rapport annuel de l'Observatoire national du 115, estimant à plus de deux millions les appels "décrochés" au 115 en 2010
Mais face à ces besoins importants, les écoutants sont confrontés à un véritable "déficit de solutions" à fournir aux appelants : selon différentes enquêtes et données administratives exploitées, plus de 40 % des demandes d'hébergement, voire jusqu'à 65 % dans certains cas, ne donnent pas lieu à l'attribution d'une place, les couples avec enfants étant particulièrement touchés.
Si les appels varient peu en fonction des saisons, ce n'est pas le cas des attributions de places d'hébergement, soumises à de fortes variations saisonnières "malgré les engagements réitérés des pouvoirs publics à pérenniser les dispositifs".
Les non-attributions baissent ainsi, durant l'hiver, "avec le renforcement temporaire des dispositifs  d'hébergement au gré des variations de températures (jusqu'à un doublement des places disponibles)", mais "la  tendance repart ensuite à la hausse au mois d'avril, avec des remises à la rue forcées, pourtant contraires au principe de continuité de l'accueil"
La "précarité change de visage", souligne également l'Observatoire national du 115, qui évoque des appelants déjà connus pour les deux tiers, de nombreuses familles avec enfants (elles constituent désormais la moitié des demandes), la présence de plus en plus de jeunes majeurs de 18 à 25 ans, souvent des hommes en rupture familiale (Rapport annuel de l'Observatoire national du 115, 2011)

Encadrement des loyers, quelles solutions ?
Une mission avait été confiée par le Maire de Paris à R. Dutrey, élu d’EELV et président de la commission Urbanisme, Logement et Paris Métropole. Elle consistait à étudier les différentes politiques d’encadrement des loyers dans les pays européens et d’évaluer les possibilités de mettre un frein à la hausse des loyers du secteur privé et de proposer le dispositif le mieux adapté au marché locatif parisien. Après avoir présenté les politiques d’encadrement des loyers existant en Allemagne, Suède et Suisse, les possibilités offertes par la législation française actuelle ainsi que les propositions (ou leur absence) des différents partis politiques, le rapporteur préconise un système d’encadrement des niveaux de loyers souple. Cette modification du système actuel de fixation des loyers nécessiterait des modifications législatives pour aller vers la mise en place d’un « mécanisme facile à utiliser, permettant au bailleur de fixer efficacement le loyer et ouvrant au locataire un recours amiable ». S’appuyant sur des observatoires des loyers fiables et harmonisés, des bases de données permettraient de repérer les zones tendues justifiant de mettre le marché « sous surveillance ». En dehors de ces zones tendues, les loyers devraient être fixés en fonction des loyers du voisinage, tels que pratiqués pour des logements comparables (réactivation et simplification  des mesures d’encadrement prévues par la loi du 06/07/89). « Dans les zones géographiques où le niveau et l’évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l’ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif, un décret en conseil d’Etat, pris après avis de la Commission nationale de concertation, fixerait le montant maximum d’évolution des loyers. ». L’objectif, sur ces zones, serait de faire baisser les loyers de 20%. 
Par ailleurs, le locataire pourrait saisir la commission de conciliation, jusqu’à 6 mois après l’entrée dans le logement, pour contester le niveau de son loyer.
Au Sénat, les sénateurs de gauche ont profité de l’examen en cours du projet de loi de F. Lefebvre sur la «protection et l’information des consommateurs» pour faire passer un amendement qui instaure l’encadrement des loyers et qui s’inspire globalement des conclusions du rapport de R. Dutrey. Cet amendement ne devrait pas être retenu par l’Assemblée nationale (« Mission sur l’encadrement des loyers Quelles solutions ? », R. Dutrey,Conseil de Paris, Nov.2011).

"Les nouvelles politiques du logement " 
Régulation des marchés fonciers, construction, logement social, accession à la propriété,le site de débats « Métropolitiques » propose une recension d’articles récents et plus anciens pour nourrir la réflexion sur  les « nouvelles politiques du logement ». 

Comment améliorer la connaissance et la mesure du mal-logement ? 
Les difficultés de logement frappent de plus en plus de Français, mais l’ampleur et lanature de ce phénomène restent mal connues. Cet article propose un tour d’horizon des indicateurs statistiques existants et des pistes pour améliorer la mesure du mal-logement (« Comment améliorer la connaissance et la mesure du mal-logement ? » ; MT Join Lambert ; Les Chantiers de l’Idies n°20 - 11/2011).

2/ Discrimination : documentation et informations générales

Europe :

Mobilité des travailleurs bulgares et roumains sur l’économie de l’UE : l’incidence est globalement positive 
Un rapport publié  par la Commission européenne met en évidence le rôle globalement positif des travailleurs mobiles de Bulgarie et de Roumanie dans l’économie des pays d’accueil. Ces travailleurs ont contribué à la diversification des compétences ainsi qu’à l’occupation de postes vacants dans des secteurs et pour des emplois connaissant une pénurie de main-d’œuvre comme la construction et les secteurs des services domestiques et de la restauration. 
Les estimations montrent également l’incidence positive de la libre circulation des travailleurs roumains et bulgares sur le PIB de l’UE à long terme, avec une augmentation d’environ 0,3 % pour l’UE-27 (0,4 % pour l’UE-15). Des études mettent aussi en évidence l’absence de répercussions importantes sur le taux de chômage ou les salaires des travailleurs locaux dans les pays d’accueil. 
Le rapport souligne également l’absence d’éléments de preuve indiquant un recours abusif aux allocations par les citoyens de l’UE mobiles à l’intérieur de l’Union et montre que l’incidence des afflux récents sur les finances publiques nationales est négligeable, voire positive.
M. László Andor, commissaire européen à l’emploi, aux affaires sociales et à l’inclusion a fait part de son désir de voir toutes les restrictions du marché du travail levées.
Les principales destinations des expatriés de Bulgarie et de Roumanie ont été l’Italie et l’Espagne. 
Le rapport de la Commission servira de base au Conseil pour l’évaluation du fonctionnement pratique des dispositions transitoires sur la libre circulation des travailleurs bulgares et roumains. À ce jour, dix États membres (la Belgique, l’Allemagne, l’Irlande, la France, l’Italie, Malte, les Pays-Bas, l’Autriche, le Luxembourg et le Royaume-Uni) imposent toujours des restrictions à l’accès des travailleurs de Bulgarie et de Roumanie. Ils ne peuvent maintenir de restrictions au-delà du 31 décembre 2011 que s’ils informent la Commission d’une grave perturbation (ou d’un risque de grave perturbation) pour le marché du travail au plus tard le 31 décembre 2011. Ces dispositions transitoires expirent irrévocablement le 31 décembre 2013 («Report from the commission to the council on the Functioning of the Transitional Arrangements on Free Movement of Workers from Bulgaria and Romania», 11/11/11).

Guide pratique sur les projets d’intégration des migrants au niveau local 
Le réseau européen contre le racisme publie un guide sur les projets d’intégration des migrants au niveau local en se basant sur des exemples de projets menés à travers l’union européenne et des conseils sur les façons de planifier des projets d’intégration. 
Le document recense également les principes qui devraient sous-tendre les projets et cherche à promouvoir l’intégration comme un « processus dynamique à double sens d’acceptation mutuelle de la part de tous les immigrants et résidents des Etats membres ». Disponible en version française, il s’adresse particulièrement aux associations qui travaillent avec des communautés de migrants aux plans local et régional (« Guide pratique sur les projets d’intégration des migrants au niveau local », ENAR, 2011).

France :

L’obligation de neutralité étendue au secteur privé de la petite enfance ?….
La Cour d’appel de Versailles a confirmé, dans un arrêt du 27/10/11, la légalité du licenciement pour faute grave de la directrice adjointe de la crèche associative Baby-Loup de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), fondé sur le refus de l’intéressée de retirer le voile qu’elle avait adopté au retour d’un congé parental, en infraction avec le règlement intérieur de la structure. 
Le principe de laïcité et le règlement intérieur de la crèche avaient largement motivé le jugement initial du Conseil de prud'hommes. La cour d’appel, si elle confirme ce jugement, semble se fonder pour partie sur des arguments juridiques plus «classiques » ayant déjà donné lieu à des jurisprudences, tout en étendant sensiblement leur champ d’application. D’autres « considérants » motivant la décision sont par contre plus surprenants.
Selon ses statuts, l’objectif de la crèche Baby Loup  est « la revalorisation de la vie locale, sur le plan social, professionnel et culturel sans distinction d’opinion politique ou confessionnelle ».  La cour d’appel estime dès lors, qu’au vu de sa vocation, la crèche doit « assurer une neutralité du personnel » et que c’est le sens de certaines dispositions de son règlement intérieur actuel mais également du règlement intérieur précédemment en vigueur.
Plus surprenant, dans un de ses « considérants »,  la Cour estime également que « ces enfants, compte tenu de leur jeune âge, n’ont pas à être confrontés à des manifestations ostentatoires d’appartenance religieuse ».
Pour la Cour, les restrictions prévues par le règlement intérieur sont dès lors « justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché », conformément au Code du travail. 
La Cour note également que ce règlement a toujours été strictement appliqué au sein de la structure concernée puisque des rappels à la neutralité  avaient précédemment  été faits à plusieurs salariées, dont la plaignante. Par ailleurs, elle note que cette dernière, au titre de ses fonctions, était en contact avec les enfants. En conclusion, elle estime donc que « l’association pouvait légitimement s’opposer au port du voile pendant l’exercice des fonctions de la salariée et que son licenciement ne présente pas de caractère discriminatoire. »
Il est à noter que cette affaire avait également donné lieu à une première délibération de la Halde, mais où la lecture des faits était divergente et surtout la lecture du droit. En effet, pour la Halde les principes de laïcité et de neutralité ne peuvent s’appliquer à des salariés d’une association qui n’exerce pas une mission de service public. En outre, le règlement intérieur tel qu’appliqué par l’association revenait à interdire de manière générale et absolue la liberté religieuse au sein de l’association et était donc illicite. La Haute autorité estimait également que « le port du voile ne constitue pas à lui seul un acte de prosélytisme ». 
Puis la Halde avait effectué – en même temps qu’un changement de présidence– un revirement de « jurisprudence » sur cette question en prenant une nouvelle délibération cf Veille doc&infos LCD et Logement n°21 prônant la mise en place un cadre de dialogue «portant sur la prise en compte du fait religieux dans le secteur public et privé » et permettant d’examiner « l'opportunité d'étendre les obligations de neutralité qui s'imposent dans les structures publiques aux structures privées des secteurs social, médico-social ou de la petite enfance chargées d'une mission de service public ou d'intérêt général" (CA de Versailles, 27/10/11, n°10/05642).

…. Et aux assistant(e)s maternel(le)s exerçant à domicile ?...
C’est dans ce contexte que la sénatrice F.Laborde a  déposé une proposition de loi visant à étendre l’obligation de neutralité aux structures privées de la petite enfance ainsi qu’aux assistantes maternelles exerçant à domicile. Le texte a  commencé à être examiné en séance publique le 07/12/11, la discussion devant se poursuivre le 17/01/12.  Le texte a suscité de vives critiques avec  comme point d’achoppement son article 3, qui prévoit que, dans le silence du contrat liant un particulier employeur à un assistant maternel, ce dernier devra s’abstenir de toute manifestation d’appartenance religieuse dans le cadre de son activité de garde d’enfants.

… Ainsi qu’aux parents accompagnants lors de sorties scolaires 
Dans une décision du 22/11/11, le Tribunal Administratif de Montreuil a jugé que les parents volontaires pour accompagner les sorties scolaires « participent […] au service public de l’éducation » et que « le principe de neutralité de l’école laïque fait obstacle à ce qu’ils manifestent, […] par leur tenue ou par leurs propos, leurs convictions religieuses, politiques ou philosophiques ».Le règlement intérieur d’un établissement scolaire peut donc légalement exiger de ces parents accompagnateurs qu’ils respectent « dans leur tenue et leur propos la neutralité de l’école laïque » (TA de Montreuil, n°1012015,08/11/11).

Le licenciement d’une salariée de la CPAM refusant de retirer un foulard en forme de bonnet n’est pas discriminatoire
Mme A. a été engagée, le 04/09/01, en CDI par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine Saint Denis (CPAM 93) en qualité de « technicienne prestations maladie ».
Courant 2003, le Directeur Général de la CPAM découvre au cours d'une visite du centre où elle est affectée, que Madame A. porte dans l'enceinte des locaux de la CPAM un foulard en forme de bonnet. En mai 2004, une procédure disciplinaire est initiée à son encontre et la salariée est licenciée pour faute avec indemnités, le 29/06/04, pour « non-respect des dispositions du règlement intérieur de la CPAM et refus persistant d'obéir aux recommandations de l'employeur ». 
Invoquant la nullité de son licenciement et son caractère discriminatoire, Madame A. saisit le 24/05/05 le conseil de prud'hommes de Bobigny qui lui donne raison.
La Cour d’Appel de Paris, par un arrêt en date du 09/11/11, infirme la décision de 1ère instance. En effet, pour la Cour, « bien que Madame A. soit liée à la CPAM par un contrat de droit privé, il n'est pas contestable que celle-ci travaille dans un service public en raison de la nature de l'activité exercée par la Caisse, qui consiste notamment à délivrer des prestations maladie aux assurés sociaux de la Seine Saint Denis ; qu'elle travaille en particulier comme « technicienne de prestations maladie » dans un centre employant 68 personnes et accueillant en moyenne 650 usagers par jour parmi lesquels se trouvent des personnes soumises à des conditions de grande précarité, peu important que la salariée soit ou non en contact direct avec le public. » A ce titre, elle doit « se conformer au respect du principe de laïcité et de neutralité s'appliquant à l'ensemble des services publics ».
Dès lors, cette exigences de neutralité fait obstacle à ce que les agents de la CPAM, disposent du droit, pendant leur service et sur le lieu de leur travail de manifester leur appartenance religieuse par un accessoire vestimentaire ostentatoire, ce qui était le cas du foulard en forme de bonnet que portait Madame A. 
La décision de licenciement de la CPAM était donc fondée sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la salariée n'ayant pas été licenciée en raison de ses convictions religieuses comme elle le soutient, mais en raison de la manifestation (par le port d'un accessoire vestimentaire ostentatoire) de ses croyances religieuses dans le cadre de l'exécution d'un service public dans lequel doit prévaloir le respect du principe de laïcité et de neutralité (CA de Paris, S 10/01263-CR, 09/11/11).

La “diversité” à l’hôpital : identités sociales et discriminations.
Cette étude a été publiée par le Centre Migrations et Citoyennetés de l’Institut français des relations internationales (Ifri) et s’appuie sur une étude de terrain conduite en  2009 et 2010 dans 4 établissements hospitaliers de la Région Ile-de- France et 116 entretiens réalisés.
Selon les auteurs, la "diversité" est aujourd'hui une  réalité importante des établissements hospitaliers en France. Mais« les perceptions et représentations sociales qui encadrent cette diversité s'inscrivent dans une logique institutionnelle propre aux établissements hospitaliers et ne ressemblent pas aux cadres dominants du débat public sur ces sujets. Ainsi, alors que le débat public se focalise sur la question de la laïcité à l'hôpital (refus de soin, port de signes religieux par le personnel), cette question n'est pas perçue comme prioritaire par les professionnels sur le terrain. L'observation sur le terrain et l'analyse des entretiens conduits montrent également que la réalité du travail quotidien à l'hôpital ne reflète aucun des « problèmes de l'islam à l'hôpital » perçus comme préoccupants dans le débat public. L'institution ne fait l'objet ni de revendications « identitaires » ni de pratiques « communautaristes » qui l'empêchent de fonctionner. En revanche, la politisation dont ces questions ont fait l'objet au cours des récents mois crée parfois des situations difficiles à gérer. Pour les auteurs, cela contribue à figer des négociations qui sont nécessaires au fonctionnement normal des services.
En revanche, trois formes de discrimination raciale, réelle ou ressentie, ont été observées à l'hôpital : celle des patients à l'égard des soignants en raison de l'origine réelle ou supposée de ces derniers ; celles des soignants à l'égard des patients ; celles des collègues ou des supérieurs hiérarchiques. La forme la plus souvent citée par les enquêtés est la première. Les professionnels de santé disent la subir quotidiennement, sous la forme d'une remise en cause de leur compétence ou de refus de soin, par exemple. C'est ce qu'ils appellent le « racisme ordinaire ». Le plus souvent, le personnel médical et paramédical banalise ces attitudes et propos racistes en les justifiant par l'asymétrie de la relation de soin : le patient est âgé, malade, fragile et il est donc excusé. Les soignants font le plus souvent abstraction de ce racisme pour pouvoir faire leur métier et soigner tous les patients.
Dans tous les cas, les conflits sont réglés au sein du service par les membres de l’équipe de soin.D’après les témoignages recueillis, « les situations de racisme ou de discrimination raciale ne sont qu’exceptionnellement portées en dehors du service, vers les membres de la direction des établissements, et encore moins fréquemment vers des instances extérieures aux établissements comme le Défenseur des Droits. »
Ces phénomènes n'apparaissent que rarement comme une priorité dans la réflexion et l'action des gestionnaires des établissements (direction, RH).En l'absence de règles institutionnelles claires et adéquates en la matière, le personnel est souvent contraint à des « bricolages » : prise en charge de patients ne parlant pas français, respect des préférences ou interdictions alimentaires des patients, accueil des familles de patients, etc. Dans ces « bricolages », le personnel issu de l'immigration ou originaire des DOM-TOM occupe une place centrale car il sait utiliser des compétences culturelles adaptées aux patients qui sont nécessaires au bon fonctionnement du service. Ces bricolages conduisent également à contourner parfois les règles formelles à partir d'appréciations de la situation par les responsables des services.
En conclusion l’étude formule plusieurs recommandations, allant de la formation et de la sensibilisation à la lutte contre les discriminations jusqu’à la mobilisation des diverses parties prenantes dans la mise sur pied de système d’alerte et d’outils de prévention des discriminations (La " diversité " à l'hôpital : identités sociales et discriminations,  29/08/11, C. Bertossi et D. Prud’homme, Ifri)

Adoption par le Sénat d’une proposition de loi constitutionnelle accordant le droit de vote aux étrangers non communautaires aux élections municipales
Le Sénat a adopté, le 08/12/11, par 173 voix contre 166, la proposition de loi constitutionnelle visant à ouvrir aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne et résidant en France depuis plus de cinq ans la possibilité de voter et d'être élu aux élections municipales. Le texte ne permet pas aux étrangers de devenir maire ni de participer aux élections sénatoriales en tant que grands électeurs. Ils pourraient seulement être élus conseillers municipaux.
Cette proposition de loi avait été adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture le... 3 mai 2000.Une loi organique décidera des modalités, notamment de la condition de résidence, qui devrait être de cinq ans. Deux amendements ayant été adoptés, il devra retourner à l'Assemblée nationale qui devrait cependant le rejeter, sauf énorme surprise. S'il est un jour adopté par le Parlement, il devra ensuite être transféré au chef de l'Etat qui gardera la possibilité de le soumettre à référendum ou … de ne rien en faire (« Proposition de loi constitutionnelle modifiée par le Sénat visant à accorder le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant en France », « petite loi », dossier législatif et compte rendu des débats).